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НарышкинСергей Евгеньевич

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Российской Федерации VI созыва

Lettre ouverte à Son Excellence Madame Anne BRASSEUR Présidente de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe

Lettre ouverte à Son Excellence Madame Anne BRASSEUR Présidente de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe

28 Mai 2014

Lettre ouverte  à Son Excellence Madame Anne BRASSEUR Présidente de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe

Madame la Présidente,

 

Le jour où cette lettre se posera sur votre bureau je fais publier son texte dans la presse. C'est la première fois que je suis obligé d'user de tels moyens pour me faire entendre.

Ce fait-même en dit long. Il faut constater avant tout que l'hystérie médiatique en Europe est à son apogée et que les voies traditionnelles pour faire savoir sa position (tout comme les débats à l'APCE) ont perdu toute fiabilité. Présidente de l'Assemblée dont la vocation est de chercher la vérité dans le dialogue, vous ne pouvez pas y être indifférente. Je suis certain que vous ne voulez pas rester dans l'histoire comme celle dont la présidence a été marquée par le démantèlement de l'essence, de la vocation même de ce forum représentatif. Je ne crois pas non plus que les membres de l'Assemblée actuelle cherchent la gloire à la façon d'Érostrate réduisant en cendres les efforts de centaines de milliers d'européens qui ont œuvré des décennies durant pour de l'avenir de notre continent. La sincérité des aspirations de ces derniers est pour moi évidente et leurs espoirs ne sont pas encore éteints.

Pourtant aujourd'hui c'est l'heure de la vérité qui sonne pour les peuples de l'Europe. J'espère que vous acceptez le fait que la Russie et l'Ukraine sont des pays européens. Un autre fait est que ce n'était pas la Russie, mais une "euro-intégration" maladroite qui a provoqué les violations massives des droits de l'homme en Ukraine et l'escalade sans précédents de la confrontation civile. Ce fut bien cette politique d'intégration incohérente qui a promu aux plus hautes fonctions de l'Etat des gens qui prônent ouvertement la discrimination ethnique et l'idéologie nazie. Je ne peux pas croire que vous puissiez les prendre pour des démocrates et voir dans les livraisons régulières et ininterrompues des "cocktails Molotov" dans les régions ukrainiennes une étape incontournable de l'intégration européenne.

Nous n'apprécions point une telle intégration. Tout comme nous n'apprécions pas cette grossière campagne anti-russe imposée de l'extérieur, et dont les membres de la délégation russe voulaient parler à la haute Assemblée. Pourtant on a choisi d'ignorer leur opinion et vous avez pris le côté de ceux qui ont fait l'autruche, préférant ne plus entendre nos arguments. Mais ce qui est aussi étonnant – c'est que vous n'avez pas défendu la cause du parlementarisme européen au moment où des élus de tout un peuple ont été "sanctionnés".

Plus que cela, ayant jeté "le voile de silence" sur les trois dizaines de parlementaires russes, l'APCE a non seulement atteint son "quota de sanction", mais elle l'a largement dépassé. En faite elle s'en est sanctionnée elle-même, se privant de possibilité d'entendre, lors des débats sur le sujet ukrainien tellement sensible ne serait-ce qu'un seul point de vue alternatif. Chez nous dans ces cas-là on se souvient de N.Gogol (un des grands fils du peuple ukrainien d'ailleurs), pour dire qu'elle "s'est fustigée elle-même, comme la veuve d'un sous-officier".

En tant que président du parlement je vois encore quelque chose qui m'étonne. Il est connu qu'aucun parlement démocratique ne peut écarter les faits d'atteinte aux droits des journalistes. La liberté d'expression et de la presse, la plénitude et la fiabilité de l'information, l'accès des journalistes même dans les points les plus "chauds" – étaient toujours un des indicateurs de la nature démocratique ou non de tel ou tel pouvoir. D'ailleurs, cet argument à plus d'une fois résonnait de la tribune de l'APCE pour dénigrer la Russie lors du conflit dans le Caucase du Nord.

Je ne crois pas que vous n'êtes pas au courant de cela, je ne crois pas que vous ignorez les violations gravissimes des droits des journalistes aujourd'hui en Ukraine et l'interdiction d'accès au pays des médias russes. Dites-moi donc, pourquoi l'APCE fait un silence pudique sur un sujet si grave? Pourquoi au lieu d'en parler les médias européens continuent leur hystérie mensongère anti-russe? Qui et pourquoi cherche-t-on à effrayer, et quel objectif poursuit-on ainsi? Est-ce vraiment celui d'allumer sur notre continent de nouveaux foyers de confrontation?

Il faut être non seulement sourd (la qualité dont l'Assemblée a parfaitement fait preuve), mais aussi absolument aveugle pour ne pas apercevoir la similitude entre "l'euromaïdan" de Kiev et les scénarios non pas moins dévastateurs joués sur les places du fameux "printemps arabe". Vous savez, je pense, que "maïdan" est un mot arabe qui signifie "place". Combien de telles places en Europe, croyez-vous, pourront encore être choisies par des forces extérieures comme "terrain d'entrainement pour l'agitation idéologique"? Peut-être ne considérez-vous pas Kiev comme une ville européenne?

Je vous prie instamment de ne pas exalter les passions à la frontière même de l'Union Européenne. Ces "jeux" sont dangereux, surtout si l'on ne s'appuie que sur des faits "commodes" ou sur la désinformation. Au lieu de cela il fallait encore en janvier-février calmer les nationalistes extrémistes de Kiev et exiger que "maïdan" soit libéré des bandits. Et au mois de mars il fallait rendre visite non pas aux autorités de Kiev frais émoulues, mais plutôt dans des villes du Sud-Est de l'Ukraine. Etudier la situation sur place, rencontrer les gens et leur parler. Sans parler de la présence personnelle au référendum en Crimée.

Je regrette que vous n'ayez pas voulu voir de vos propres yeux la joie et l'allégresse des gens au moment ou ils allaient, souvent des familles entières, aux urnes, mais aussi plus tard, après le dépouillement du scrutin. Je suis certain, si vous et d'autres membres de l'Assemblée s'y étaient rendus, il n'y aurait pas eu dans la résolution de l'APCE de ces formules du genre "score invraisemblable" pour qualifier le résultat réel du vote. La vérité n'est jamais dilatoire – elle est là, ou bien elle n'y est pas. Il n'y a pas de troisième possibilité…

Une dernière chose. On ne peut pas ignorer que le nouveau pouvoir à Kiev laisse les adeptes du nazisme défiler librement dans les rues. Et le recours aux armes et à l'explosif qui a commencé au maïdan de Kiev devient en Ukraine une chose banale. Le pays en proie aux difficultés économiques voit augmenter le nombre de vols à main armé et de braquages. Et aujourd'hui, j'ai peur, que ce ne soient plus des personnes isolées, mais des familles entières qui cherchent à se procurer des armes rien que pour l'autodéfense. Pour la seule raison que les autorités ukrainiennes actuelles se sont avérées incapables à maintenir l'ordre et à protéger les citoyens. Vous comprenez bien, je pense, quelles peuvent en être les conséquences. Je suis certain que vous comprenez aussi qui est coupable d'un meurtre de masse à Odessa, où des gens étaient brulés vifs. Les ukrainiens eux-mêmes traitent déjà ce crime abominable des néo-nazis de "Khatyn d' Odessa". Est-ce que maintenant, quand le monde entier est sous le choc de cette tragédie, vous y fermerez aussi l'œil?

Je suis persuadé qu'il faut organiser sans délais des consultations interparlementaires sur le sujet de l'Ukraine, ou la Russie doit participer. Je regrette vivement que les événements si terrifiants ont lieu au moment de votre présidence à l'Assemblée. Je suis conscient à quel point votre tâche est compliquée. Mais l'APCE et le Conseil de l'Europe dans son ensemble doivent protéger les droits de l'homme et du citoyen, veiller à défendre les vies et les intérêts légitimes des gens.

 

* * *

Bien sur, c'est loin d'être tous ce que je voudrais vous dire. Et dans cette lettre je ne m'adresse pas qu'à vous, mais à tous les membres conscients de notre Assemblée. Pourtant c'est vous qui possédez à la fois de larges compétences et une grande expérience politique. Et vous savez bien à quel point la position du président est importante pour assurer un bon et réel dialogue. Je reste persuadé, que malgré toutes les erreurs commises il existe toujours une possibilité de rétablir la paix civile en Ukraine. Et il serait impardonnable de la rater. Mais, et je le répète encore une fois, il serait impossible d'y parvenir sans la Russie.

Madame la Présidente, Il est très important pour nous aujourd'hui de rétablir la confiance. Il est importent de s'écouter et de s'entendre, bien que ça peut paraître difficile. C'est pourquoi j'appelle tous les collègues de l'Assemblée de Strasbourg à écouter la voix de la raison. Parlementaires – nous n'avons pas le droit de franchir la ligne où les conséquences pour l'avenir de toute l'Europe seraient irréparables. Et peut être pour l'avenir du monde aussi…

A cet égard je voudrais vous demander, ainsi que tous les membres de l'Assemblée qui aspirent réellement au règlement de la crise en Ukraine de ne pas commettre de nouvelles erreurs. J'attends que les droits de la délégation russe à l'APCE soient entièrement rétablis. Apres une telle décision je serais prêt à venir personnellement pour participer et intervenir à la session de l'Assemblée.

Président de la Douma d'Etat de l'Assemblée Fédérale de la Fédération de Russie

S. Narychkine